Lorsqu’une clause du contrat de bail commercial prévoit, lors du renouvellement de ce dernier, que les parties devront fixer amiablement le loyer du bail renouvelé, faut-il nécessairement passer par une phase de conciliation préalable à la saisine du juge ?

En effet, lorsque le bailleur consent au renouvellement du bail commercial, il procède à la délivrance d’un congé avec offre de renouvellement qui mentionne le montant du nouveau bail commercial.

En cas de désaccord sur le montant de ce dernier, le bailleur ou le preneur peuvent faire fixer judiciairement le loyer du bail renouvelé.

La question qui se pose est donc celle de savoir si, en présence d’une clause de fixation amiable préalable du loyer du nouveau bail commercial, les parties sont nécessairement tenues d’organiser une procédure de conciliation obligatoire préalable à la saisine du juge.

Tel est ce que soutenait la société preneuse à bail qui a formé un pourvoi contre l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris qui avait rejeté la fin de non-recevoir qu’elle avait soulevé tenant au non-respect de l’obligation faite par une clause du bail de rechercher une solution amiable préalable.

Selon la Cour d’Appel de PARIS, la clause litigieuse ne faisait pas obligation aux parties de rechercher une solution amiable à leur différend avant de saisir le juge, cette stipulation se bornant à préciser que le montant du loyer de renouvellement serait fixé judiciairement en l’absence d’accord amiable entre les parties.

La société preneuse estimait au contraire que la clause litigieuse permettait de constater que les parties avaient convenu que le montant du loyer de base du bail renouvelé devait être fixé d’un commun accord entre elles, d’une part, et que ce serait à défaut d’accord amiable que la fixation du loyer de base en fonction de la valeur locative pourrait échoir au juge compétent.

La question n’était pas anodine puisque la Cour de Cassation considère comme une fin de non-recevoir les clauses instituants entre les parties un préalable obligatoire de conciliation.

En l’espèce, la Cour de Cassation donne toutefois raison à la Cour d’Appel de PARIS en faisant valoir que cette dernière avait retenu, sans dénaturation, que la clause du bail commercial en litige se bornait à préciser le montant du loyer sera fixé judiciairement en l’absence d’accord amiable entre les parties sans instaurer une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge dès lors que cette dernière prévoyait que « les parties conviennent que le montant du loyer de base du bail ainsi renouvelé sera fixé d’un commun accord entre elles et, à défaut d’accord amiable, les parties décident dès à présent de demander au juge compétent de fixer le loyer de base en fonction de la valeur locative ».

Toutefois, il convient de ne pas tirer de cet arrêt des conséquences qu’il ne pourrait avoir.

La Cour de Cassation ne revient nullement sur le régime de fin de non-recevoir instauré au titre des clauses instituant entre les parties un préalable obligatoire de conciliation mais évalue ce régime en fonction de la rédaction de la clause et de son contenu.

De fait, c’est bien la rédaction de la clause qui en détermine la conditionnalité et le caractère contraignant.

Sur ce point, si la clause prévoyait bien l’existence d’une nécessité pour les parties de déterminer amiablement le montant du loyer, l’absence de conditions particulières de mise en œuvre exclut que ladite clause soit considérée comme imposant un préalable de conciliation à la saisine du juge.

Il appartiendra donc aux rédacteurs des contrats de bail commercial d’être particulièrement attentifs à la rédaction des clauses portant instauration d’un préalable obligatoire de conciliation en aménageant les règles spécifiques de cette conciliation en cas de bail renouvelé.

François Carré – Avocat à la Cour d’Appel de POITIERS

Cour de Cassation – 3ème civ, 17 juin 2021 – n°20-12.844